Journal du jeudi 8 mai 2014

Bonsoir à tous,

Le temps a changé aujourd’hui : la pluie est continue et le vent instable. Nous ne serons pas à l’heure pour le rendez-vous avec le troisième satellite : nous le regrettons mais nous sommes très dépendants des conditions météo. Un grand merci à l’équipage du voilier : Fred le skipper, secondé par Patrick, Laurent et Romain. Grâce à eux nous naviguons en sécurité, sans appréhension et les scientifiques peuvent se concentrer sur leurs manips.

Les nouvelles du bord sont quand même bonnes et le moral toujours haut. Nous sommes maintenant à 500 milles des portes du gyre. Nous devrions y arriver le 10 mai, dans 2 jours.

Les manips ont continué ce matin, dès 5h30. Kris (responsable ESA : Agence Spaciale Européenne) a ainsi réalisé des observations et pris des mesures sur l’état de la mer et l‘atmosphère, in situ, pendant que le satellite SENTINEL 1 réalisait une photo radar de la zone. Les rendez-vous avec les prochains satellites ont été légèrement modifiés, ce qui ne nous laisse pas beaucoup de marge pour la route à suivre et la vitesse à laquelle nous devons nous y rendre. Mais on y croit !

Vers 10h , la bouée gyroplastique a été mise à l’eau, suivie des deux filets Manta, pour une durée d’ une heure.

Aujourd’hui nous allons vous détailler la manip d’échantillonnage du microplastique et du plancton des eaux de surface grâce au filet Manta.

Nous avons utilisé un filet Manta dont la maille est de 300 microns et un autre de 20 microns qui nous permettra de pouvoir piéger des très petites particules de plastique. Comme leur nom l’indique, ces filets ont une allure de raie avec 2 ailes qui leur assurent un maintien optimal à la surface de l’eau. Les filets filtrent l’eau de mer de surface et piègent toutes les particules dont la taille est supérieure à leur maille. Ces particules, composées de plancton, de débris végétaux et de plastique sont ensuite conservées dans de l’eau de mer à laquelle nous aurons ajouté du lugol acide comme conservateur. Claire, la scientifique d’OSL sera chargée d’analyser ces échantillons une fois l’expédition rentrée au port. Une partie des échantillons prélevés sera confiée au programme éducatif Argonautica, afin d’être analysée par les collégiens et lycéens partenaires de l’expédition. Hier nous avons trouvé dans les échantillons quelques particules de plastique, plus ou moins visibles à l’œil nu : fil de pêche, et de nombreux petits morceaux non identifiés. Aujourd’hui la pêche a été plus riche en plancton et en algues (morceaux de sargasses) !

D’ailleurs savez-vous ce qu’est le plancton ?

C’est l’ensemble des êtres vivants (végétaux et animaux) qui ne sont pas autonomes dans leurs déplacements à la surface des océans : ils dérivent avec les courants. Par contre ils peuvent effectuer des migrations verticales dans la colonne d’eau, en fonction de l’ensoleillement. Le plancton est la base de la chaine alimentaire marine. Il est le régime alimentaire de nombreux êtres vivants, qui eux-mêmes sont le régime alimentaire d’autres animaux. Sans plancton, il n’y aurait pas de vie dans les océans !

Nous avons rencontré aujourd’hui nos premiers macrodéchets : bouteilles et morceaux de plastique mélangés à des algues brunes. Nous avons aussi trouvé une bouée surmontée d’une perche, qui a du probablement être une marque de repérage de filet de pêche. Un véritable écosystème a commencé à se créer sur ce radeau improvisé : algues, anatifes, vers et crabe. C’est de cette manière que certaines espèces côtières partent à la conquête de nouveaux lieux de vie, devenant parfois des espèces envahissantes, quand elles arrivent dans un milieu où elles n’ont pas de prédateur. Nous avons remis à contrecoeur ces objets à l’eau, car nous ne sommes pas équipés pour ramasser tout ce que l’on va rencontrer. L’équipage a quand même récupéré le lest de la perche qui sera utile pour nos manips.

Nous nous sommes fait un compagnon de voyage cet après-midi : un labbe, oiseau de haute mer, s’est pris d’amitié avec le voilier et nous suit depuis plusieurs heures ! Peut-être plus par intérêt car nous sommes le seul objet flottant plein de nourriture dans les parages! Dans la journée nous avons pu aussi observer des Phaetons, oiseaux marins blancs reconnaissables à leur très longue queue. Les oiseaux marins ne gagnent la terre que pour nicher. Croiser un oiseau en mer est toujours une rencontre d’exception pour les navigateurs, car elle brise leur solitude pour quelques heures.

Romain nous épate toujours avec sa cuisine : nous avons testé une délicieuse recette de gâteau au pain, avec les restes de pain dur du bord. Il nous a aussi confectionné des canapés de tartare d’exocet échoué sur le pont du bateau. Avec Romain, rien ne se perd, tout se transforme !

Claire passe le bonjour à sa petite famille : son compagnon et sa fille Leïa.

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