Microplastiques Marins : Plongée dans la Matière en Décomposition
Plusieurs millions de tonnes de déchets plastiques sont déversées dans les océans chaque année. Une fois en mer, le plastique ne disparaît pas. Il se fragmente en particules plus petites, appelées microplastiques. Présents en nombre dans les flots du monde, l’importance de leur impact sur l’écosystème marin reste à évaluer. Avant de pouvoir le définir, il faut en savoir davantage. De quoi sont faits ces microdéchets ? Comment se détériorent-ils ? Que deviennent-ils ? Les scientifiques d’Expédition 7e Continent se sont penchés sur ces questions. Pour mieux y répondre, ils ont étudié des échantillons de microplastiques marins du gyre subtropical de l’Atlantique Nord. Explications.
Pollution plastique des océans : histoire d’une dégradation
Le plastique versé dans les océans vogue vers différents destins. Les débris non-flottants échouent sur les plages, ou viennent tapisser les fonds marins. Portés par les courants, les déchets flottants se disséminent dans les zones pélagiques du monde, des abysses à la surface de l’eau salée. Ingéré par la faune marine ou partie intégrante de son habitat, le plastique affecte toute la biodiversité océanique.
Sous l’effet de l’environnement extérieur, les macrodéchets de plastique se désagrègent progressivement. Rayons UV du soleil, variations de température, force des vagues et du courant : ces processus de photodégradation et processus mécaniques altèrent leur surface, jusqu’à les fragmenter. De plus petits débris sont ainsi créés. Ils sont considérés comme des microplastiques lorsque leur longueur devient inférieure à 5 mm. Ils s’accumulent notamment dans les zones de convergence des cinq principaux gyres océaniques. Ces tourbillons de courant attirent les déchets, qui s’y retrouvent piégés.
Microplastiques marins : les connaître, pour les comprendre
En 2015, le Dr. Montserrat Filella mettait en avant l’importance de la caractérisation des microplastiques dans les questions environnementales. Les étudier peut donner des indications sur leur rôle et leur devenir. Leur taille, leur forme, la façon dont ils se dégradent, ont certainement un impact sur leur distribution dans l’écosystème aquatique.
Dans ce cadre, les chercheurs d’Expédition 7e Continent ont analysé des débris de plastique flottants issus du gyre subtropical de l’Atlantique Nord. Leur but : proposer un modèle de fragmentation des microplastiques marins. Pour ce faire, six échantillons d’eau de surface ont été collectés grâce à des filets adaptés (filets à neuston). Leurs mailles mesurant 300 µm de diamètre, les nanoplastiques de taille inférieure n’ont pas été pris en compte dans cette étude.
Caractérisation des microplastiques : du polyéthylène en perdition
Chaque type de plastique présente un spectre infrarouge qui lui est propre. En le comparant à une base de données, il est possible d’identifier les matières récoltées. Ainsi, une analyse par spectroscopie montre que 92 % des déchets collectés sont composés de polyéthylène (PE). Il s’agit d’un plastique très courant. Réputé pour sa robustesse, le PE est notamment utilisé dans la fabrication des bouteilles et des sacs plastiques. Ces échantillons ont également fait l’objet d’explorations physiques. Ils ont été comptés, pesés et mesurés :
- 90 % des fragments de plastique sont de taille inférieure à 2 mm ;
- 75 % des particules de moins de 2 mm pèsent moins de 1 mg ;
- la masse totale des microplastiques représente seulement 31 % de la masse totale des échantillons.
Bien que le nombre de microplastiques soit très élevé, leur masse totale est faible. Les données extraites de ces analyses ont été comparées à un modèle mathématique. Théoriquement, la masse totale des microplastiques de moins de 1 mg devrait être largement supérieure à celle observée en laboratoire. Comment expliquer une telle différence ?
Comportement des microplastiques marins : une question de taille
Pour compléter ces découvertes, les chercheurs ont procédé à d’autres tests. La surface des débris a été examinée par microscopie. Des plastiques non détériorés issus d’emballages et d’objets du quotidien ont servi à la comparaison. Une reconstitution 3D (microtomographie) a permis d’étudier les fissures. Les analyses confirment que la fragmentation des microplastiques est largement due aux phénomènes photochimiques. Sous l’effet des UV, les chaines de polymères cassent et fragilisent la structure.
Une partie des débris observés sont plats, de forme parallélépipédique, et de taille comprise entre 2 et 5 mm. Des fragments de forme cubique sont également présents. La majorité d’entre eux fait moins de 2 mm de long. Au bout du compte, les analyses physicochimiques pratiquées permettent d’identifier deux comportements distincts des microplastiques :
- Les débris plats parallélépipédiques présentent une face détériorée, davantage exposée aux rayons du soleil que sa jumelle. L’autre face est recouverte d’un biofilm bactérien, naturellement développé lors d’un contact prolongé avec l’eau. Ceci suggère qu’ils flottent dans un sens en particulier. Les contraintes environnementales et la photodégradation induisent progressivement des fissures de surface. Des particules plus petites sont ensuite formées par fragmentation le long de ces fissures, jusqu’à donner des petits débris cubiques.
- Les faces des déchets cubiques sont altérées de façon similaire. Elles sont donc exposées équitablement aux UV. Ces microdébris ont ainsi tendance à rouler dans les vagues. En outre, ils se désagrègent plus rapidement que les débris plats.
La vitesse de dégradation des débris cubiques pourrait expliquer le manque de microplastiques de moins de 1 mg précédemment recensé. En se détériorant en particules de taille inférieure à 300 µm, ils deviennent indétectables. Ceci pose la question de la nécessité de développer des études complémentaires, notamment sur les nanoplastiques marins. En effet, le manque d’information dans ce domaine persiste.
Alimenter la recherche pour comprendre la réalité de la pollution plastique des océans : un enjeu crucial, d’ordre mondial.
Article rédigé par Sandra Lafargue au cours de la formation en rédaction web SEO chez Formation Rédaction Web. La relecture scientifique a été réalisée par Valérie Pruneta, docteur en biochimie.
Source : Understanding the Fragmentation Pattern of Marine Plastic Debris